ROGNON? BIEN SÛR !

Félicien Automne (années '50)
Félicien Automne (années '50)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une palette vigneronne  d'hiver

encadre à présent

la palette estivale de l'artiste.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un blog plein de souvenirs et de nostalgie, à lire ou à zapper, s'il n'évoque rien pour vous. Pour moi, c'est un peu comme un calisson de Giono*.

 

Ma grand-mère dirigeait d'une main d'acier trempé les colonies de vacances organisées par la commune d'Etterbeek - où le bourgmestre a récemment fait parler de lui, en bien, en écrouant, rigor legisdes SDF afin de leur éviter la rigor mortis - pour les enfants des écoles défavorisés par le sort. L'administration possédait deux biens immobiliers réservés à cet effet: l'un à Coxyde-Bains (à présent revendu, détruit et remplacé par des résidences de milieu de gamme) et l'autre à Rebecq-Rognon. Ce dernier s'appelait "le château" et il appartient aujourd'hui à des particuliers qui en ont fait une magnifique résidence. J'ai été en contact avec eux (très aimables) pour y faire une petite visite mélancolique mais il n'en a encore rien été.

 

Au moment où le couple de concierges (la famille Pizzinato) "ouvrait" les lieux, au début du printemps, il n'était pas rare que nous y passions quelques jours. Parfois, c'était durant le congé de la Pentecôte ou de l'Ascension (dans l'ordre chronologique qui vous plaît). Cela sonne un peu comme un privilège d'aristos, car l'endroit était plaisant, mais ma grand-mère surveillait effectivement le nettoyage des lieux après la pause hivernale, elle remettait la cuisine en état de marche et l'utilisait pour nos repas, et elle inspectait les chambres-dortoirs (pas plus de 5-6 lits chacun) ainsi que les sanitaires. C'était un bonheur pour mon frère et moi de disposer de toute une rangée de douches, le sol pour y arriver étant recouvert d'une espèce de bulgomme bleu chiné, imperméable et très moelleux au pied. En outre, Bobonne se démenait année après année de manière bénévole pour aller quêter les fonds de fonctionnement et recruter femmes de ménage, cuisinières et moniteurs pour la saison. En outre, je sais qu'elle donnait une petite "dringuée" (wallonnisation de "drinkgeld") à Ada et Jean (alias Giovanni). C'est eux qui m'ont appris la propreté en me laissant courir cul nu (déjà!) sur le terrain, y compris à la saison des pêches (tardives en Belgique) et des raisins de table (idem), car il est arrivé, à la fin des années '50, qu'on y passât un couple de jours en octobre aussi. 

 

Le parc comportait un verger magique, agencé comme un péristyle à ciel ouvert autour d'une pelouse centrale. Il offrait pommiers et pêchers, de jolis buissons de buis très odorant, et d'innombrables essences d'arbres dont un hêtre pourpre de légende. Une serre adossée au corps de bâtiments permettait la culture de variétés indigènes de raisin. Et puis, il y avait la fameuse pompe à bras, que je n'ai jamais vu fonctionner, et son "poempbak", qui lui n'était pas kapot.

 

Des amis du "mayeur" et de ma grand-mère avaient dû y séjourner aussi, car Félicien Automne, peintre amateur d'un certain talent - il aimait peindre des nus, tu penses! - a réalisé pour ma grand-mère la jolie huile sur bois que j'ai pu récupérer. Je pense vous l'avoir déjà présentée par le passé, mais j'ai refait l'encadrement et elle pend maintenant en bonne place dans la chambre-à-coucher. 

 

Je perçois encore l'odeur un peu urineuse du buis, les feuilles dans les taillis,

les tartes à la prune de Namur (quetsch) et à la rhubarbe qui cuisent

dans le four Utrillo - petit clin d'oeil à Maurice Valadon en passant -

et je songe ... au temps béni des premières saisons! 

 

 

* Equivalent provençal de la madeleine de Proust

 

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