UN LONG PONT

Respect et incompréhension
Respect et incompréhension

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mon long pont, sur la Truyère,

pas la River Kwai,

exigeait une explication.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En effet, nous avons passé trois morceaux de journée et deux nuits en Lozère, et j'ai devant moi une autre paire de jours fériés. Le 8 mai ne m'évoquait rien qui pût mettre le bon peuple au repos. En Belgique, ce n'est pas un jour férié. 

 

Avant de me fâcher avec tout le monde, je précise que les monuments aux morts me rendent triste et me font à chaque fois irrémédiablement penser à la chanson de Maxime Le Forestier, Les Lettres, écrite au temps où il était encore un chanteur engagé et ne pleurnichait pas pour garantir ses cachetons auprès de la Sacem. Et Dieu sait s'il en existe, en France, de ces hommages aux nombreuses victimes de la barbarie des dirigeants, tous les dirigeants. Je m'incline devant le courage des combattants et la souffrance de leurs familles.

 

Là, Christine discutait le bout de gras avec une boulangère récemment installée à Serverette (Lozère) et en pétard avec tout le village, la mairesse comprise. Et moi, la croyant chez l'épicier (deux maisons plus loin sur la départementale), je battais le pavé devant cette stèle. On y mentionne "Yser". Pour un enfant du Bachten de Kupe, un ancien de Bayer ("Shame on me") et un ex-amoureux des jolies blondes de Diksmuide et de Ieper, cette évocation prend des connotations spéciales.

 

Mais revenons à ce fameux 8 mai. On se souvient des calculs - bien compréhensibles - de Dönitz pour arracher certains de ses régiments à la barbarie des cosaques du Don et autres combattants russes en négociant un armistice séparé avec les Alliés - censés appliquer la Convention de Genève ou en tout cas son esprit - tout en continuant les combats sur le front de l'est pour se désencercler. Staline, lui, ne l'entendait pas de cette oreille et Eisenhower non plus, surtout que les charniers des camps de la mort révélaient de plus en plus de leur horreur. Ce n'est donc finalement que dans la nuit du 8 mai 1945 que la reddition du Reich est définitivement actée.

 

En France, sa commémoration a suivi un schéma parkinsonien: on/off! C'est finalement Mitterrand - l'homme à la Francisque, NB - qui a rétabli ce jour férié dans le calendrier de la république en 1981. Par un curieux coup du sort, c'est aussi la date du début des grands massacres perpétrés contre le peuple algérien à Sétif, Guelma et Kherrata - au moins 20.000 morts d'après le renseignement états-unien, et 45.000 d'après les Algériens eux-même. Mais ça, suivant le schéma Gergovie/Alésia d'Astérix-le-Gaulois, on n'en pipe mot dans l'hexagone. Attention, les Belges ne pleurent pas Patrice Lumumba non plus, dans leur énorme majorité. Moi bien. 

 

Chez moi, soit parce que la famille régnante est d'origine allemande et que 80.000 de mes compatriotes sont germanophones, soit car la Belgique n'était déjà plus occupée à cette date depuis le succès allié dans la bataille  des Ardennes (janvier 1945), on n'a pas jugé utile de marquer d'un jour chômé cette fin des hostilités. Pourtant, l'armistice du 11 novembre 1918 l'est. Allez comprendre. C'est ce qu'on pourrait appeler grivoisement "couper les poilus en quatre".

 

Il y a quelques jours, trois irresponsables de notre époque ont décidé conjointement, sans l'aval de leurs parlements respectifs, de risquer un nouveau conflit d'envergure en bombardant sévèrement la Syrie de leurs missiles de croisière, au nez et à la barbe des Russes et de l'Iran. Ils n'ont rien compris.

 

Enfin, si, ils ont compris l'appel des sirènes des marchands d'armes.

 

 

 

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