Les Charlier ont eu des rapports
conflictuels avec l'école.
Moi, j'ai toujours détesté cela. Mon frère unique et préféré, Thierry donc, a passé quatre années d'idylle dans la classe de Michel Vlaminck à l'école communale N° 7 d'Etterbeek, dont notre grand-père maternel - lui ne l'a jamais connu - avait été "dirlo", in illo tempore; celle de la rue Beckers. Ensuite, transféré à la section préparatoire du bahut honni où j'ai subi mon secondaire, il a d'abord hérité d'un instit' atrabilaire souffrant effectivement de l'estomac. Une fois encore, au lieu de considérer le point de vue des élèves, et donc de mettre cet enseignant en incapacité, le ministère et la ville de Bruxelles ont privilégié l'institution et "l'avantage" du personnel. De même, les hôpitaux sont d'abord conçus pour leurs salariés (soignants, administratifs et d'entretien) et ensuite seulement pour les patients. Een wereld op z'n kop.
Après cela, la "terreur" absolue lui a été dévolue pour sa sixième primaire, le sévère Joseph Verdeyen, issu d'une famille de fermiers aux origines partiellement limbourgeoises, et marié à une femme d'exception - on s'en est rendu compte plus tard - de la famille d'une collègue ophtalmo à ma mère. En fait, cette terreur n'était rien d'autre qu'un instituteur fier de son métier, amoureux des élèves, épris de savoir et de rectitude. Parfois son intransigeance comportait un peu d'excès et il redressait avec peu de retenue certains élèves qu'il comprenait moins bien. Mais cela ne leur a sans doute pas fait de tort, au-delà d'une vexation occasionnelle. Actuellement, on évoquerait peut-être une forme de "harcèlement", car les associations de parents d'élèves ont tendance à reprocher aux profs de combler le vide éducatif qui règne dans certaines familles. C'est un autre sujet.
Thierry est vite devenu le "chouchou" et sa vive intelligence a tiré un profit majeur de l'année passée sous la férule de Joseph, un enseignant très didactique. Il n'a pas joui d'un favoritisme, mais bien d'une attention profitable. Et il y a répondu par de la dévotion, ce qui n'est pas la marque de fabrique de notre fratrie.
J'arrête ici mon panégyrique, le tout s'est soldé par une solide amitié intergénérationnelle, qui perdure cinquante ans plus tard. Jeff a 85 ans, qu'il porte bien et porte beau.
Les ennuis de santé de Thierry l'ont peiné, lui qui a eu son lot de tristesse également. Et la nouvelle de son amélioration, en phase d'accélération à présent même si le chemin à parcourir reste considérable, lui a fait du bien. Je suis allé chercher mon frère à son domicile dimanche dernier et vous voyez le résultat de leurs retrouvailles.
Généralement, ce sont les écoles confessionnelles qui prêtent à des rapprochements "tendres" entre de leerkracht et leurs ouailles. Ici, c'est une franche amitié qui se manifeste, avec pudeur et dignité.
Je n'ai aucune réserve à vous montrer ce cliché.
Merci Joseph de tout ce que tu as apporté à mon petit frère,
et de toute la gentillesse témoignée par la famille Verdeyen-Farnir
dans son ensemble envers les miens.
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