Rien ne s'est passé comme prévu!
Premier éveil à 4 h 24' du matin. Madame est à la montagne "pour le bon air", moi, a la casa, pour le numéraire.
Du coup, c'est l'adénome congestionné qui m'a réveillé de ses urgences masculines, et non l'écran plasma de la tablette qui vient si souvent au secours des insomnies féminines. On est vraiment de Mars et de Vénus.
Je me suis rendormi aussi sec; enfin, façon de parler, car le pommeau arrose un peu tout de même.
Je possède en fait un vieux GSM - vous savez, le modèle qui reste chargé plus de 15 jours sans faiblir, mais qui n'a pas d'écran - dont je ne me sers quasiment jamais. Quasiment, car au bout de dix minutes, je suis arrivé à mettre à jour sa montre et son calendrier, puis à entrer une heure de réveil: 6 h 25'.
Deuxième éveil donc à 6 h 25' du matin. Mais il m'a fallu 7 minutes pour le désactiver.
Ensuite, petit espresso bien tassé, "Ma, la Pavoni elle fait des merveilles, Loûk' ".
Départ réel sur le coup de 7 heures: il y a un diable à la place du passager, huit cartons d'Eglise (pour neutraliser le diable) sur les sièges arrières, et la malle est pleine du reste de la cargaison.
J'arrive pile-poil à la Cité de Carcassonne, néglige de prendre garde au petit feu rouge avant le pont-levis et me trouve nez-à-nez avec la voiturette municipale qui nettoie la chaussée, giro-phare et brosses rotatives en pleine action. On se frictionne ... presque. La montée vers la Barbacane se négocie ensuite en seconde, j'évite trois Japs en goguette, deux Yanks ensommeillés et un Syrien en guenilles qui prennent déjà des photos. Enfin, pas le Syrien, lui, il fouille les poubelles du Best Western à la recherche d'un petit-déj. La porte de l'entrée des fournisseurs cède du premier coup devant mon Sésame. Normal, les marmitons font déjà chauffer l'huile pour les tempura. Je décharge ma marchandise, avec l'approbation d'un des employés de la cuisine qui tire déjà avidement sur son clope, première pause de la journée: il est 8 h 10'. Ce brave garçon en sabots m'explique que le meilleur itinéraire pour sortir est de revenir sur mes pas, identiquement. Je ne passerai donc pas par la Lorraine. Il m'avertit aussi que c'est l'heure où pas mal de livreurs montent ....
Par chance, je me mets dans le sillage du camion-benne des éboueurs, qui me sert de bouclier et m'ouvre la voie. Décidément, le consulat de Syrie doit avoir du boulot dans l'Aude. Ca pue mais ça roule!
Tout en bas, je salue le vigile dans son poste de garde: il me semble reconnaître Alexandre Benalla. Mais je ne le jurerais pas sur la tête de ma soeur. Gérard Collomb, lui, avait prêté serment. Je ne serai jamais Ministre d'Etat, si vous voulez que je vous dise.
Ensuite, je m'enfile tous les ronds-points vers Salvaza - je préfère ce nom à l'infâme logo "Sud de France" - car je suis sûr d'y trouver du gasoil. Et il y en a, des giratoires autour de Carca. Et de fait, le plein je fais. Plus exactement, je fais l'appoint pour pouvoir continuer ma route car le découvert autorisé par le crédit à bricoles a rétréci comme un soufflé abandonné sur un passe-plats. Et la A 61, westbound, s'ouvre enfin à moi.
Pas un chat sur le périphérique de Toulouse: Rangueil, les Demoiselles, Purpan, Blagnac, Colomiers ... Le Puits Saint Jacques n'est pas loin. Il est 9 h 55' et on m'accueille à la réception. Le temps de livrer à l'office et le sommelier me rejoint."Tu es mon sauveur, me dit-il, il me reste trois cols!". N'exagérons rien, je suis plutôt le modeste envoyé des vignes du Seigneur, pas le big boss. Pourtant, le centurion Longinus n'aurait eu aucun mal à me transpercer le foie, malgré sa vue défaillante: il y a de la place pour viser!
Certains disent bien que je suis une plaie, mais en aucune manière les Saintes Plaies.
"La voiture ainsi allégée, notre vigneron comptait déjà dans sa pensée tout le prix de son vin. Il en employait l’argent, s'achetait un fourgon, faisait triple tournée. La chose allait à bien par son soin diligent. Il m’est, disait-il, facile d'assurer les livraisons avant le service de midi ..."
Et bien, non, Jean. Des milliers de touristes obstruent l'Autoroute des Deux Mers et, de warnings en warnings, il est presque 13 heures quand je franchis le canal de la Robine. Comme je suis peu au fait des gadgets de la communication moderne, mais pas stupide quand même, j'avais télé-obtenu de Christine le numéro de téléphone de ma dernière destination: La Cranquette. Je suis très fier d'avoir su ouvrir le "sms" (texto en France) qu'elle m'a envoyé. Et on m'attendait pour déjeuner.
Un petit steak d'espadon plus tard, mes derniers cartons rejoignaient aussi le cellier de ce tout nouveau client.
Je vous ai parlé d'eux ICI et encore ICI.
"Plus de rage plus de carnage, l'ours est bien mort ce soir. A-wimboé, a-wimboé ...".
Je peux le dépecer et vendre sa peau: allez mangez à Gruissan. Je vous ai parlé avant-hier du Delphinium à Valras-Plage, mon coup de coeur " équilibré, fiable et classique" sur la côte biterroise. Cette Cranquette représente son pendant à La Clape, dans l'Aude. La cuisine y est plus inventive, plus osée, mais fait elle aussi appel à de très bons produits et le conseil qu'on vous donnera pour choisir votre vin peut être suivi en toute confiance également.
On les aime, nos petits clients.
Comme Ducros, on se décarcasse pour les bien servir!
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